Consommation d'énergie des data centers

Entre performance et sobriété énergétique

5 mars
2025

La facture énergétique d’un datacenter représente plus de 50 % de ses dépenses. Au-delà de la maîtrise de leurs consommations énergétiques, les exploitants de ces infrastructures doivent respecter des réglementations européennes et françaises de plus en plus ambitieuses. Le secteur du numérique représente, en France, plus de 10 % de la consommation d’électricité.

La France prévoit la mise en service de 35 data centers* dédiés à l’intelligence artificielle en France à partir de 2025 répartis sur tout le territoire métropolitain.  

Qu’est-ce qu’un datacenter ? 

C’est un espace physique qui regroupe des équipements informatiques (serveurs, baies de stockage…) permettant le stockage, le traitement et la protection de données. 

Ses principaux composants sont :

  • Les serveurs : ce sont eux qui hébergent les bases de données, applications et sites internet ;
  • Les baies de stockage des données ;
    L’architecture réseaux : ce sont les routeurs et commutateurs qui permettent de relier ces éléments entre eux et avec l’extérieur ;
  • Une unité de distribution d’énergie, avec un bloc d’alimentation d’urgence ;
  • Un système de climatisation et de refroidissement ;
  • Des systèmes de protection contre les intrusions informatiques.

Les serveurs informatiques représentent 50 % de la consommation énergétique de ces infrastructures. Près de 40 % de leurs consommations énergétiques sont imputables aux équipements de refroidissement.

Implantation des centre de données en france

*Source : Elysée 

Quels sont les niveaux de classification des data centers ?

Il existe 4 niveaux de classification TIER. Ces niveaux permettent de mesurer la fiabilité d'une infrastructure informatique :

  • Le niveau TIER 1 (basique) :

Le data center est composé d’une seule alimentation électrique, sans aucune redondance que ce soit pour l’infrastructure ou la climatisation. Ce type de data center dispose d’un taux de disponibilité de 99,671 %, et nécessite au moins un arrêt annuel pour maintenance (en moyenne 28,8 heures d’interruption par an).

  • Le niveau TIER 2 (redondance) :

Il s’agit d’un centre de données doté de capacités de redondance pour sa production : cuves à fioul, groupes électrogènes, câbles BUS, onduleurs, production de froid. La distribution d’électricité et de froid n’est pas redondante. Le taux de disponibilité d’une infrastructure de niveau TIER 2 est de 99,741 %, il faut prévoir en moyenne 22 heures d’interruption par an.

  • Le niveau TIER 3 (maintenabilité) :

Un centres de données de TIER 3 est maintenable , ce qui signifie que l’ensemble de ses composants sont redondants (plusieurs voies d’alimentation et de refroidissement). Son taux de disponibilité est de 99,982 %, et il subit en moyenne 1,6 heure d’interruption par an.

  • Le niveau TIER 4 (tolérance aux pannes) :

L’infrastructure est équipée d'une redondance complète de l’ensemble de ses composants et circuits de distribution. Un centre de données de TIER 4 dispose d’une réponse automatique aux pannes unique, d’un compartimentage coupe-feu, de fonctions « Continuous Cooling » et « Continuous Power », ce qui lui permet de continuer à fonctionner lors de pannes et d’incidents. Son taux de disponibilité est de 99,995 %, et son fonctionnement est interrompu moins d’une heure par an en moyenne (0,8 heure).

 

Consommation énergétique d’un centre de données

  • PUE

D’après l’ADEME, les centres de données pourraient représenter 6 % de la consommation d’électricité en France en 2050. Dans son rapport sur le développement du réseau de 2024, RTE estimait une consommation de 29 TWh en 2040.

Le PUE (Power Usage Effectiveness) est un indicateur de performance permettant de qualifier l’efficacité énergétique d’un data center selon la formule :

PUE = (Energie totale consommée par le data center (MWh))/(Energie consommée par les systèmes informatiques (MWh))

La valeur moyenne du PUE en 2024 était de 1,5 (ADEME), la performance globale des infrastructures s’est donc améliorée puisque le PUE en 2016 était de 1,8.

Par définition, le PUE est toujours supérieur à 1 mais l’objectif de ces infrastructures est de se rapprocher de cette valeur. Le PUE des nouvelles installations doit avoir une valeur maximale de 1,2 (ADEME).

  • DCEM

L'indicateur énergétique DCEM (Data Center Energy Management) a été créé pour remplacer l'indicateur traditionnel PUE. Le DCEM valorise la récupération de chaleur dans les datacenters, a contrario du PUE qui dégrade les valeurs des indicateurs ignorant les services énergétiques apportés par le datacenter en dehors de son strict périmètre informatique.

Le DCEM permet de mesurer l'énergie qui entre dans le process, mais aussi la part d'énergie réutilisée pour d'autres usages (récupération de chaleur fatale), et la part d'énergie renouvelable. L'échelle est différente pour les centres de traitement de données construits avant et après 2005 (protocole de Kyoto) afin d'encourager les datacenters les plus anciens qui fournissent des efforts pour améliorer leur bilan énergétique.

Le calcul de l’indicateur DCp (DCEM) est effectué en multipliant plusieurs éléments :

Tableau classe performance

Source : Greenit.fr

  • ERF

L’ERF (Energy Reuse Factor) caractérise la quantité d’énergie réutilisée en dehors du Data Center. Dans la plupart des cas, l’énergie valorisée est la chaleur fatale émise par le Data Center. L’ERF se calcule selon la formule suivante :

ERF= (Energie réutilisée à l’extérieur du data center)/(Energie totale consommée par le data center)

Plus l’ERF est proche de 1, plus le Centre de données revalorise l’énergie qu’il consomme.

Quel est l’impact carbone et environnemental des centres de données ?

Décarbonation

Le secteur du numérique en France est à l’origine de l’émission de 19,7 millions de tonnes de CO2 équivalent, soit 2,87 % des émissions de gaz à effet de serre (source ADEME).

Une étude de GreenIT (2021) a estimé que les impacts environnementaux annuels du numérique en France représentaient 6,3 % de la consommation d’énergie primaire, 3,3 % des émissions de gaz à effet de serre et 2,2 % de la consommation d’eau du territoire.

Quelles réglementations sont applicables aux data centers ?

Au niveau international

La loi d’économie d’énergie japonaise de 2022 impose une cible de PUE fixée à 1,4 pour toutes les salles serveurs de plus de 300 m².

En Chine, la norme minimale de performance datant de 2022 concernant les nouveaux datacenters ou les agrandissements donne 3 niveaux de PUE :

  • Niveau 1 : PUE ≤ 1,2 ;
  • Niveau 2 : PUE ≤ 1,3 ;
  • Niveau 3 : PUE ≤ 1,5.

Au niveau européen

La directive européenne sur l’efficacité énergétique (EED) de 2023 impose aux data centers ayant une puissance IT supérieure ou égale à 500 kW de mettre à disposition du public des informations relatives à leur performance énergétique (superficie au sol du data center, puissance installée, consommation d’énergie, utilisation de chaleur fatale…). De plus, les infrastructures ayant une puissance IT de plus de 1MW doivent désormais valoriser leur chaleur fatale sauf en cas d’impossibilité technique et/ou économique.

En Allemagne, les data centers ayant une puissance IT supérieure ou égale à 300 kW doivent respecter les seuils suivants :

  • Existants avant le 1er juillet 2026 : PUE ≤ 1,5 au 01/07/2027, PUE ≤ 1,3 au 01/07/2030 ;
  • Construits après le 1er juillet 2026 : PUE ≤ 1,2 et ERF ≥ 10%.

Aux Pays-Bas, l’obligation d’économie d’énergie et notification de 2019 impose aux data centers commerciaux consommant plus de 50 MWh d’électricité par an ou plus de 25 000 m3 de gaz naturel d’adopter les mesures d’économie d’énergie ayant un temps de retour sur investissement (TRI) inférieur ou égal à 5 ans.

Au niveau français

Le dispositif Éco Énergie Tertiaire ou décret tertiaire est applicable aux data centers de plus de 1 000 m² ou salles informatiques contenues dans un bâtiment de plus de 1000 m². Il est imposé une baisse de 40 % d’ici 2030, de 50 % d’ici à 2040 et de 60 % d’ici à 2050 de leur consommation annuelle en kWh/m² par rapport à une année de référence ou l’atteinte d’un objectif de consommation en valeur absolue exprimé en kWh/m²/an. Les surfaces sont à déclarer dans la catégorie « Salles serveurs et centre d'exploitation informatique ».

Les dispositions fiscales françaises permettent aux infrastructures de bénéficier d’un taux réduit de TICFE (12€ / MWh) jusqu’à fin janvier 2026 à condition :

  • D'être certifié ISO 50001 ;
  • D'adhérer à un programme de mutualisation des bonnes pratiques de gestion énergétique des data centers reconnu par une autorité publique (nationale ou internationale) ;
  • De valoriser la chaleur fatale, limiter l’utilisation de l’eau à des fins de refroidissement et maintenir un niveau d’électro-intensité au moins égal à 2,25 %.

Comment limiter les consommations énergétiques des data centers ?

Plusieurs actions permettent la réduction des consommations d’énergies des centres de données :

  • Confinement des allées chaudes et allées froides : les baies sont alignées de front, les zones vides des racks sont obturées et l'air froid est acheminé par le faux plancher ;
  • Choisir des équipements avec des plages de fonctionnement en température élargies : la plupart des experts recommandent aujourd’hui de faire fonctionner les serveurs à une température de 27°C. La norme ETSI EN 300-019-1-3 propose aux fabricants de garantir leurs équipements pour une température de fonctionnement comprise entre 5°C et 40°C et l’association américaine des professionnels du conditionnement d’air (ASHRAE) recommande une température d’ambiance des salles de fonctionnement comprise entre 18°C et 27°C ;
  • Free-cooling : Le free-cooling permet de climatiser les locaux grâce aux températures de l'air extérieur inférieures aux conditions de températures intérieures requises. L’air est traité en hygrométrie, et filtré avant d’être insufflé. C'est une énergie quasi gratuite qui nécessite l’installation d’un système de ventilateur et permet de se passer de la climatisation une majorité de l'année dans les zones géographiques le permettant. Néanmoins, ce système ne permet pas de supprimer totalement la climatisation. Des besoins peuvent subsister lors des périodes saisonnières suivantes :
    • lorsque la température de l'air extérieur est supérieure à la température de consigne intérieure, en été et mi-saison.
    • lorsque les niveaux d'humidité de l'air sont supérieurs aux niveaux tolérés par les équipements informatiques ou dépassent la capacité de traitement du système de déshumidification installé. 
  • Autoconsommation : l’installation de panneaux solaires photovoltaïques permet de produire et consommer sa propre électricité tout en limitant l’empreinte carbone du data center ; 
  • Flexibilité de la consommation électrique : l’étude GIMELEC de septembre 2024 met en avant l’important gisement de flexibilité représenté par les data centers. Diverses pistes (stockage stationnaire par batteries, alimentation sans interruption, systèmes de refroidissement, …) peuvent être sources de flexibilité et permettront ainsi de participer à l’équilibre du réseau électrique français ;
  • Récupération de chaleur fatale : la chaleur fatale est générée par les systèmes informatiques et par les systèmes de refroidissement. La quasi-totalité de l’énergie électrique consommée par le matériel informatique est dégagée sous forme de chaleur. L’identification de potentiels consommateurs voisins (piscine, industriels, serres, hôpitaux, EHPAD, écoles, réseaux de chaleur, ...) et de leurs besoins (ECS, chauffage, …) permet de définir la meilleure façon de valoriser la chaleur fatale. L’ADEME, dans une étude de 2017, estimait que 3,6 TWh de chaleur fatale pouvait être récupérés sur 177.

    Près de 80 % de ces gisements ont un niveau de température inférieur à 40°C, les 20 % restants ont un niveau de température compris entre 40°C et 100°C. Dans le cas des industriels ou d’un réseau de chaleur, si le besoin en température est supérieur à la température récupérable au niveau du datacenter, la rehausse de température par une PAC (Pompe à Chaleur) permet de valoriser la chaleur fatale.

    Pour aller plus loin, la mise en place d’un système de management de l’énergie suivant la norme ISO 50001 permet l’amélioration continue de la performance énergétique du datacenter. La certification ISO 50001 conditionne désormais l’accès à la réduction de la TICFE (Taxe Intérieure sur la Consommation Finale d’Electricité) pour les datacenters. 

Quelles sont les aides financières applicables aux data centers ?

 

  • Fonds Chaleur

Le Fonds Chaleur de l’ADEME permet de financer des projets de récupération de chaleur fatale provenant de data centers, à condition que la chaleur soit valorisée à l'extérieur du site.

  • Certificats d’Economies d’Energie (CEE)

Le dispositif des Certificats d’Économies d’Énergie (CEE) met à disposition plusieurs fiches d’opérations standardisées pour les Data Centers, permettant de financer des actions d’optimisation énergétique. Parmi elles, plusieurs fiches ciblent l’amélioration de l’alimentation électrique et du refroidissement ou encore les systèmes de régulation sur les groupes froid. D’autres opérations visent la récupération de la chaleur fatale issues d’équipements informatiques.

Grâce aux CEE, ces actions bénéficient d’un soutien financier, facilitant ainsi la transition énergétique des centres de données.

les aides financières pour les datacenters

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