71e arrêté CEE

Le 71e arrêté CEE, une réorientation stratégique du dispositif qui impacte principalement les entreprises

9 juillet
2025

marque collective cee

Paru le 8 juillet 2025, le 71e arrêté relatif au dispositif des Certificats d’Économies d’Énergie (CEE) marque un virage majeur. Il entérine la suppression de 10 fiches d’opérations standardisées d’économies d’énergie, parmi les plus utilisées, et la modification de 6 autres. Les fiches supprimées représentent environ 27 % des volumes de CEE délivrés à ce jour dans le cadre de la 5e période (P5), qui s’achèvera en fin d’année 2025. Ces modifications ont déjà un impact sur le cours des CEE classiques et précarités, mais également sur les projets de travaux d’économies d’énergie des entreprises industrielles et tertiaires. Quelles sont les opérations d’économies d’énergie concernées ? Cette suppression annonce-t-elle la fin du dispositif CEE ? Décryptage.

Pourquoi cette suppression massive de fiches CEE ?

L’annonce soudaine à la mi-mai de la suppression de 11 fiches d’opérations standardisées d’économies d’énergie a surpris l’intégralité des acteurs, tant par le changement abrupt de stratégie que par l’impact de cette suppression sur le dispositif, à seulement 6 mois du démarrage de la 6ème période (2026-2030).

L’objectif affiché par l’administration consiste à recentrer les financements sur les opérations réellement incitatives, dans le sillage des recommandations de la Cour des comptes. La réalisation d’actions d’économie d’énergie présentant un temps de retour sur investissement (TRI) inférieur à 3 ans après déduction de l’aide CEE ne doit plus être incitée par les CEE.

loupe

À noter que des exceptions pourront être accordées lorsque le TRI de l’opération sera proche de ce seuil des 3 ans : un coefficient de minoration (soit une bonification inférieure à 1) pourra être appliqué, sur le fondement de la loi « contre toutes les fraudes aux aides publiques » - également dite loi « Cazenave » - promulguée le 30 juin 2025. Ce devrait notamment être le cas pour les fiches d’opérations standardisées IND-UT-131 « Isolation thermique des parois planes ou cylindriques sur des installations industrielles » et BAR-TH-117 « Robinet thermostatique ».

Ces 10 opérations, jugées peu légitimes par le gouvernement à bénéficier de primes CEE, sont écartées du dispositif. Suivant cette nouvelle règle, d’autres suppressions de fiches d’opérations standardisées devraient suivre dans les prochains mois, en fonction du calcul de leur TRI.

Ce 71ème arrêté vise à restaurer la crédibilité du dispositif, limiter les effets d’aubaine et mieux aligner les primes CEE avec les objectifs d’économie d’énergie nationaux.

Cependant, la conséquence à court terme de ces suppressions de fiches d’opération standardisées d’économies d’énergie sera probablement un ralentissement massif des actions concrètes pour la transition énergétique, ce qui est contradictoire avec les objectifs du pays en termes d’économies d’énergie.

Nouveautés 2025 : ce que prévoit le 71e arrêté CEE

L’arrêté prévoit :

  • La suppression de 10 fiches d’opérations standardisées d’économies d’énergie dès le 1er août 2025 (à noter : la fiche RES-CH-106 « mise en place d’un calorifugeage des canalisations d’un réseau de chaleur », qui figurait initialement dans le projet d’arrêté, n’est finalement pas supprimée au motif que les situations de surfinancement n’étaient pas démontrées) ;
  • La modification de 6 fiches ;
  • Un renforcement significatif des exigences de traçabilité et de contrôle qualité.

Ces mesures s’inscrivent dans une volonté de préparer la 6ème période du dispositif CEE (P6), qui devrait débuter le 1er janvier 2026 pour une période de cinq ans.

 

Les 10 fiches supprimées dès le 1er août 2025

Les opérations visées concernent les secteurs Industrie, Tertiaire, Réseaux et Résidentiel :

Référence de la fiche Intitulé
IND-UT-117 Système de récupération de chaleur sur un groupe de production de froid
IND-UT-121 Isolation de points singuliers d’un réseau
IND-UT-136 Systèmes moto-régulés
IND-BA-112 Système de récupération de chaleur sur une tour aéroréfrigérante
BAT-EQ-133 Systèmes hydro-économes (France métropolitaine)
BAT-TH-104 Robinet thermostatique
BAT-TH-146

Isolation d’un réseau hydraulique de chauffage ou d’eau chaude sanitaire (France métropolitaine)

BAT-TH-155

Isolation de points singuliers d’un réseau

RES-CH-107

Isolation de points singuliers sur un réseau de chaleur

BAR-TH-160 Isolation d’un réseau hydraulique de chauffage ou d’eau chaude sanitaire (France métropolitaine)

 

 

Les 6 fiches modifiées par le 71e arrêté

Référence de la fiche Intitulé Nature des principales modifications
IND-BA-110   Système de déstratification d’air (France métropolitaine)

- Exclusion des entrepôts logistiques, réserves, entrepôts et locaux de stockage ainsi que des locaux dont la température de consigne est inférieure à 15°c ;

- Exigence de bâtiments entièrement clos ;

- Le système ne peut chauffer l’air ni être alimenté par un système de chauffage ou de récupération de chaleur fatale ;

- Critères de qualification pour la réalisation de la note de dimensionnement et le calepinage (OPQIBI 1327 ou 1717 ou référentiels définis par les normes NF X 50-091, NF EN 16247 ou équivalentes) ;

- Révision des forfaits qui ne dépendront plus de la hauteur du local ni du mode de fonctionnement mais du type de système.

BAT-TH-142  Système de déstratification d’air (France métropolitaine)

Mêmes exigences que la IND-BA-110 et :

- Exclusion des brasseurs d’air plafonniers ;

- Critères de qualification pour réalisation de la note de dimensionnement et le calepinage : OPQIBI 1327 ou 1905 ou référentiels définis par les normes NF X 50-091, NF EN 16247 ou équivalentes ;

- Suppression de la distinction pour les usages des locaux ;

- Limitation à 45 dB ou 45 dB(A) du niveau de bruit maximum au sol du fonctionnement du système.

BAT-EQ-127  Luminaire à modules LED Exclusion du remplacement de luminaires à halogènes, entrainant une légère diminution des forfaits.
BAR-SE-108  Désembouage d’un réseau hydraulique individuel de chauffage en France métropolitaine Exclusion des boucles d’eau chauffées en tout ou partie par une pompe à chaleur air/eau, eau/eau ou sol/eau ou par une pompe à chaleur hybride. Changement des certifications exigées, qui seront désormais listées sur le site du ministère.
BAR-TH-141  Climatiseur performant (France d’outre-mer) Suppression de tous les forfaits en maison individuelle
BAR-TH-161   Isolation de points singuliers d’un réseau Exclusion des échangeurs à plaques

 

Des exigences de contrôles renforcées

Le 71 ᵉ arrêté CEE vise également à améliorer la fiabilité des opérations d’économies d’énergie à travers un renforcement :

  • De la traçabilité : les actions engagées sur la base des fiches d’opérations standardisées en vigueur jusqu'au 31 juillet devront être transmises au PNCEE le 15 août au plus tard ;
  • Des exigences de contrôle qualité ;
  • De l’encadrement technique des opérations.
étude crayon et régle

À noter : Certaines opérations, telles que la pose de déstratificateurs d’air (BAT-TH-142 et IND-BA-110), seront soumises de manière systématique à 100 % de contrôles sur site pour les opérations engagées à compter du 1er août 2025.

les CEE dans le transport

CEE 2025 : accélération inédite pour le secteur transport

Parallèlement à cette suppression de fiches, une autre évolution majeure touche les fiches d’opérations standardisées liées au secteur du transport, jusqu’ici marginal dans le dispositif.

Jusqu’en 2024, les opérations liées à ce secteur ne représentaient qu’environ 3 % des volumes de CEE délivrés, alors même que ce secteur pèse plus de 32 % des émissions nationales de gaz à effet de serre.

En décembre 2025, la tendance s’inverse avec la publication du 65e arrêté CEE qui introduit plusieurs évolutions majeures applicables au 1er avril 2025 pour favoriser l’électrification des transports et le report modal vers des solutions moins carbonées. Ce texte marque une volonté forte de l’État de rééquilibrer les efforts du dispositif CEE vers ce secteur, historiquement sous-représenté.

6e période CEE : les grandes lignes se dessinent

À six mois de l’échéance, le niveau d’obligation de la 6ème période (P6) du dispositif des CEE n’est pas encore définitivement arbitré. Lors du Copil CEE du 2 juillet 2025, le gouvernement a présenté les premières orientations qui seraient retenues :

  • Obligation portée à 1 050 TWhc/an, soit une hausse de +27 % par rapport à la P5, avec une obligation CEE précarité fixée à 280 TWhc/an;
  • Dans le sillage de la loi Cazenave, les seuils franchises seront abaissés de manière significative pour le fioul domestique (500 m3 1 000 m3), les carburants (500 m3 vs. 7 000 m3) et le GPLc (500 t vs. 7 000 t). L’électricité et le gaz naturel (100 GWh/an[1]) ne sont pas concernés à ce stade, mais le gouvernement n’exclut pas un abaissement dans les semaines à venir ;
  • Confirmation de la règle du TRI/reste à charge minimal pour le bénéficiaire et poursuite du mouvement de suppression des fiches d’opérations standardisées présentant une « sur-rémunération », à commencer par les bonifications relatives aux fiches chauffage biomasse ;
  • Limitation de la part dévolue aux programmes à 500 TWhc sur la P6 (à noter : il s’agit là d’une doctrine, qui ne sera pas déclinée de manière réglementaire) ;
  • Maintien du secteur industriel hors de l’assiette d’obligation CEE ;
  • Durcissement du coefficient d’obligation classique par énergie :

Energie

Coefficient P6

Unité

FOD

8 179

kWhc/m3

Carburants

8 350

kWhc/m3

GPLc

11 335

kWhc/t

Chaleur et froid

0,964

kWhc/kWh

Electricité

0,894

kWhc/kWh

GPL combustible

0,863

kWhc/kWh PCS

Gaz naturel

0,806

kWhc/kWh PCS

 

Le décret en Conseil d’Etat relatif à la P6 sera, après consultation publique et un passage en Conseil supérieur de l’énergie (CSE) le 24 juillet, soumis au Conseil d’Etat en vue d’une publication au début de l’automne.

[1] Seuil identique pour le GPL combustible

Quels impacts pour votre entreprise ?

Pour les bénéficiaires industriels ou tertiaires, ce tournant réglementaire représente un défi. Certaines des opérations d’économies d’énergie qu’ils avaient prévus de mener dans les prochaines années ne sont plus éligibles à une prime CEE, augmentant le montant de l’investissement nécessaire.

Les entreprises les plus réactives pourront toutefois adapter leur stratégie, en identifiant dès à présent des opérations nouvellement éligibles à une prime CEE, en profitant des « coups de pouce » ou bonifications qui réhaussent temporairement le montant des subventions CEE pour certaines actions d’économies d’énergie, en anticipant les projets à lancer avant la suppression effective des fiches ou en valorisant leur projet d’économie d’énergie sous le scope des CEE spécifiques.

Dans le but de simplifier vos démarches, nous avons mis à profit notre expertise technique et financière pour développer une plateforme en ligne intuitive, vous permettant de déposer vos demandes de primes CEE en quelques clics seulement.

gaz

Zoom sur le coup de pouce pour le remplacement de systèmes de chauffage

Le dispositif Coup de pouce « Chauffage des bâtiments résidentiels collectifs et tertiaires » vise à accélérer la transition énergétique en encourageant le remplacement d’équipements de chauffage anciens, peu performants ou fortement émetteurs de gaz à effet de serre. Destiné aux copropriétés, bailleurs sociaux et gestionnaires de bâtiments tertiaires, ce coup de pouce permet de bénéficier de primes CEE renforcées. Les travaux éligibles incluent notamment l’installation de systèmes de chauffage performants utilisant des énergies renouvelables, comme les chaudières biomasse ou les pompes à chaleur. La date d’achèvement des opérations engagées dans le cadre de ce coup de pouce a d’ailleurs été prolongée d’un an, soit jusqu’à fin 2027.

Agissez dès maintenant 

Face à cette nouvelle donne, il est essentiel pour les entreprises du secteur industriel et tertiaire de :

  • Revoir leur portefeuille d’opérations éligibles CEE ;
  • Anticiper les évolutions réglementaires à venir (décret tertiaire, décret BACS…) ;
  • Renforcer leurs partenariats avec des délégataires expérimentés.

Ce recentrage du dispositif, bien qu’exigeant, représente aussi une opportunité : celle d’aligner les investissements d’efficacité énergétique avec les véritables priorités climatiques.

Besoin d’un accompagnement stratégique sur les CEE ? Contactez-nous pour évaluer l’impact des suppressions de fiches et ajuster votre stratégie avant la P6.

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